Les championnats de France de Barrel Race
Candidat suivant. Peu d’applaudissements et beaucoup de moqueries à l’entrée de Dineiro dans le manège. Qui ça ? Dineiro, un vieux cheval méconnu, au pré malgré lui, en voie de dépérissement à cause de cette mise à l’écart. Sauvetage et remise en forme par la fougue et l’amour du jeune propriétaire. En selle, Guillaume, un jeunot novice dans le milieu. Blue-jeans trop large, chemise délavée, éperons trop courts, chapeau défraichi. Et au moins vingt ans de vie pour la selle et le mors ! Quant au cheval, jolie robe baie claire mais crins noirs blanchis et queue peu fournie. Logique, au vu de ses dix-huit ans. Aucune chance de victoire pour ces deux là.
Et pourtant, la chance et les audacieux… toute une vérité !
L’épreuve : course de vitesse sur un parcours en forme de trèfle à trois feuilles, grâce à trois barils. Un seul juge : le chronomètre.
Installation du duo dos à la ligne de départ.
— Voilà le grand jour mon vieux.
Concentration du quarter horse, en attente du signal.
Bisou sonore de son maître.
Roll-back instantané de Dineiro, petit hennissement de joie à l’appui et départ au galop. Quelle rapidité ! Voilà déjà le premier bidon à l’horizon. Silence dans la foule intriguée par cette équipe inattendue. Engagement du duo autour du premier baril. Plus aucune respiration, plus aucune parole, plus aucune raillerie. Quelques quintes de toux tout de même, probablement à cause du nuage de poussières soulevées par les sabots du cheval. Changement de pied d’appel. Accélération de Dineiro impossible mais oh combien réelle ! Enroulement autour du second fût en direction du dernier obstacle. Majesté, rapidité, fluidité, que de qualificatifs pour ce galop extraordinaire d’un canasson fatigué par l’âge mais à l’entrain entier ! Incroyable cheval. Improbable course de la part de ce cheval à la retraite. Et cependant… mensonge impossible de la part du chronomètre. Passage du dernier bidon avec brio. Aucun effleurement, aucun accro, aucune gêne. Maintenant, sprint final vers la ligne d’arrivée. Un travail titanesque pour ce vieil hongre à la fringance démesurée. Encouragement de Guillaume et de la foule époustouflée par sa performance. Franchissement de la ligne d’arrivée à la vitesse de l’éclair sous l’aiguillon de l’amour-propre et de l’amour tout court pour la compétition.
— Magnifique prestation !
— Jeune homme, combien pour le cheval ? Achat possible ?
— Monsieur, par ici, un autographe, une photo pour la presse.
Sortie du manège triomphale pour le tandem sous un tonnerre d’applaudissements. Dineiro : à tout jamais un cheval d’exception. Guillaume : modeste cavalier riche de sentiments pour son quarter et maintenant riche aussi d’argent et d’honneurs.
Au final, une récompense concomitante à l’homme et à l’animal, cocarde au poitrail et trophée au cavalier.
Le pré, la retraite, plus tard…peut-être.
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